LE XIXe SIECLE DANS L'ILE DE RE

Le XIXe siècle a été pour les insulaires de Ré celui du déclin de la prospérité relative qu'ils avaient connue entre les guerres de Religion et celle de Sept ans.

Les suites de la Révolution, et la guerre

Si, après un siècle de marasme économique, ils ont d'abord accueilli la Révolution avec enthousiasme, la plupart furent vite las de ses excès et des contraintes, notamment antireligieuses, qui venaient contrarier leurs croyances et coutumes ancestrales. D'ailleurs la guerre sur leurs rivages vint tôt au premier plan de leurs préoccupations et obligations.

L'abolition de leurs privilèges qui avait eu des effets bénéfiques sur leurs conditions de vie eut de graves conséquences : la suppresssion de la franchise des droits tant à l'arrivée qu'au départ des marchandises vers l'étranger prépara la déchéance du commerce rétais avec l'Europe du Nord où se trouvait sa principale clientèle pour les sels et vins.

Les hommes de l'île avaient aussi le privilège de servir dans l'armée du Roi, mais seulement dans les milices chargées de défendre leur territoire. Les gouvernements révolutionnaires et leurs successeurs levèrent les insulaires pour les armées et vaisseaux de la République et de l'Empire alors que l'ennemi rôdait jusque dans les pertuis, gênait ou interrompait les relations avec l'étranger ou les colonies, sinon avec le proche continent, et a tenté plusieurs fois de mettre pied à terre aux Portes. Les hommes valides de seize à soixante ans qui n'ont pas été enrôlés sont, avec les troupes ou le plus souvent seuls, les servants des batteries de côtes qui protègent l'île. Ils sont astreints à monter la garde, à faire le guet et des patrouilles de nuit, à transporter vivres et matériel nécessaires aus troupes en cantonnement.

En conséquence, les travaux agricoles et salicoles, l'entretien des digues, étaient négligés. les soldats logaient chez les habitants et les rétais subissaient bien des contraintes, tels les transports de vivres, bois et autres biens nécessaires à la défense et aux défenseurs.

L'île est mise en état de siège à partir du 15 avril 1811. St Martin regorge alors de troupes : dépôt de la légion du midi, 3e dépôt colonial, compagnie de vétérans et 4e dépot de conscrits constitué de deux cent à trois cent conscrits enfermés dan sle grand bâtiment qui avait été destiné à la fin de l'ancien régime à devenir un hôpital de la Marine. A la fin de ce mois commencent à affluer les conscrits réfractaires. Ils seront près de douze mille à la fin de décembre...

Le déclin économique

Le commerce d'exportation finira par être anéanti par le Blocus : le sel, les vins, s'entassent. Par exemple, les sels de la saunaison de 1802 ne purent être vendus qu'en 1817 ! La misère est grande, les dettes de pain se prolongent et les faillites sont nombreuses. Les familles de notables, de négociants, émigrent vers le continent.

Ainsi commence le XIXe siècle qui va connaître, entre 1830 et 1854, le maximum de densité de peuplement qu'ait atteint l'île, alors que les conditions de vie y sont devenues très difficiles et ne feront que s'aggraver au cours de la seconde moitié du siècle, provoquant une intense émigration.

Cette population va vivre et travailler selon les coutumes ancestrales et avec des moyens archaïques. Les progrès industriels et agricoles ne pénètreront dans l'île que vers la fin du siècle. Certains seront même néfastes à la prospérité de l'économie insulaire : par exemple la grande construction navale et la propulsion à vapeur vont permettre la concurrence victorieuse des sels étrangers sur les marchés détenus par les producteurs de Ré, déjà très réduits à la suite des guerres. Le commerce rétais d'exploitation lointaine va disparaître, les grands navires ne pouvant fréquenter rades et ports du pertuis Breton.

Source : Pierre Tardy, préface de "Femmes de l'île de Ré" Editions Ouest-France 1996

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L'histoire de l'île de Ré